Il y a un an, Gabriel Nadeau-Dubois préparait son entrée à Québec Solidaire et le petit parti s’apprêtait à lui dérouler le tapis rouge. Une belle circonscription presque gagnée d’avance et même une modification aux statuts afin qu’il puisse être co-porte-parole.
Plusieurs voyaient en cette figure marquante du mouvement étudiant de 2012 un genre de messie. Avec lui, les hordes populaires allaient joindre Québec Solidaire, le Parti Québécois allait disparaître et le pouvoir était soudainement à portée de main.
Les mois qui suivent sont à l’avenant. GND gagne l’élection dans Gouin avec un pourcentage historique et les sondages laissent entrevoir une tendance lourde où le PQ ne fait que descendre et QS de monter.
Mais voilà… ce que certains voyaient comme une « tendance lourde » ne l’était pas. Le PQ a descendu des collines, mais n’a pas atteint le creux de la vallée… et la « montée irrésistible » de QS s’est écrasée.
 |
| Un aperçu de la plate-forme "mouvement" de Québec Solidaire |
Y’a t-il actuellement une tendance lourde?
Pendant ce temps, l’électorat qui en a assez du règne corrompu du Parti Libéral a commencé à voir la CAQ comme l’alternative la plus plausible.
Si on regarde les derniers sondages, peut-on y voir une « tendance lourde » pour la CAQ? Je ne pense pas: la seule tendance lourde que l’on peut y voir réalistement est la volonté de trouver une alternative aux libéraux et pour l’instant, cela se cristallise par un appui à la CAQ.
QS et les « poison pills »
Qu’est-ce qui explique le décollage raté de QS? C’est évidemment une combinaison de facteurs, mais chaque fois que j’observe QS, je ne peux m’empêcher de penser au concept de « dragée toxique » (poison pill) en finance. Une dragée toxique en finance, c’est l’inclusion dans les statuts et règlements de diverses clauses qui rend difficile une acquisition hostile d’une société.
QS en a pleins. Des points d’achoppements qui sont incluses dans son programme et dans ses agissements qui plaisent à une frange radicale, mais qui agissent comme repoussoir chez une majorité d’électeurs. En d’autres termes, quand on commence à trouver que QS est une alternative qui pourrait être une alternative intéressante, on se frappe à un point que l’on trouve inacceptable. À ce point, on abandonne cette option et on se tourne vers quelque chose qui est perçu comme plus inoffensif.
QS… de parti politique à mouvement populaire
Il m’apparaît certain que la jeune garde qui s’est jointe à QS avec GND trouve inspirante les nouveaux mouvements politiques du type de ceux de Bernie Sanders, la « France insoumise » et dans une moindre mesure de Macron. C’est ainsi que QS a lancé une plate-forme informatique participative appelée « mouvement » et lancé leur pré-campagne électorale sur ce thème cette semaine.
Mais je crains que la volonté et l’outils ne suffiront pas à transformer le bi-plan en fusée! L’effet des irritants contenus dans le parti politique plombe sa transformation en mouvement.
Ça prend quelque chose de plus radical. Pour en arriver rapidement à cette transformation et que QS soit perçu à temps comme une façon crédible de battre les libéraux… il faut sortir le marteau-piqueur et démolir les irritants.
Certains vont sans doute me dire qu’il faut tenir à ses principes jusqu’au bout et qu’il vaut mieux rester marginal que faire des compromis… mais cela est incompatible avec un large mouvement. Un large mouvement est bâti dans les consensus larges.
C’est d’ailleurs la force de la droite; être plus pragmatique qu’idéologique, alors que c’est le contraire à gauche.
Petite recette pour transformer Cendrillon en princesse.
Alors, comment peut-on transformer un parti politique marginal en un véritable mouvement populaire? Comment le faire rapidement pour créer une vague à temps pour les élections québécoises de l’automne 2018?
Alors, voici la recette:
1- Dans un grand bol, mettre le programme et la plate-forme électorale de QS.
2- Convoquer un congrès d’urgence pour changer les statuts de QS pour en faire un mouvement (Peut-être le renommer « Mouvement Québec Solidaire » ?).
3- Adopter un nouveau programme plus consensuel. Pour ce faire, prenons comme inspiration l’idée que nous sommes les « 99% » comme les mouvements « Occupy » (Occupy Wall Street etc). Sans aller jusqu’a dire qu’il faut 99% pour faire un large consensus, disons que si 85% des membres actuels adhèrent à un point du programme, alors il y a plus de chances que ce soit un consensus large dans la société. Alors, repasser tous les points du programme et plate-forme de QS (qu’on a mis dans le grand bol à l’étape 1) et ne garder que les points qui sont appuyés par plus de 85% des membres (pas de délégués ou du « politburro »).
4- Avec le nouveau programme, lancer le nouveau mouvement.
Est-ce possible? Je pense que non. GND et son entourage auraient eu plus de chance, je crois, de partir un mouvement de zéro l’année dernière que de transformer QS cette année. Mais, ce qui est fait est fait et il va falloir un peu de vision si on ne veut pas se retrouver avec la CAQ au gouvernement cet automne.